Une riche héritière
Nancy Cunard, héritière de la célèbre Cunard Line*, est née en 1896. Grâce à sa fortune, elle s’installe en France en 1920, oubliant un mariage aussi rapide que malheureux. Nancy Cunard écrit des poèmes et des pièces de théâtre et, au cours de ses errances, tombe sous le charme d’Aldous Huxley, auteur de célèbres livres dont "Le meilleur des mondes". Amours orageuses et sans lendemain. Au grè de ses envies ou de ses amants, elle s’installe successivement dans les endroits à la mode, d’abord à Paris à l’hôtel Ritz puis à Boulogne-sur-mer, l’île Saint-Louis, Biarritz et à Deauville.
Toujours au grè de ses humeurs, brèves rencontres avec Tristan Tzara (fondateur du dadaïsme), Georges Moore, Norman Douglas... et Louis Aragon.
*Au XIXème, la Compagnie Cunard lança les premiers vapeurs transatlantiques réguliers entre Boston, New-York et Liverpool.
C’est avec Aragon qu’elle s’installe, en 1927, à La Chapelle-Réanville dans la maison qu’elle rebaptise "le puits carré". Elle y restera pendant les dix années les plus riches de son existence.
Les dépendances aménagées deviennent le lieu de rencontre du surréalisme.
Flot de visites ininterrompu : Solita Solano, Janet Flamer, René Crevel, Georges Sadoul, John Banting, Paul Eluard, Max Ernst, André Breton,tous les surréalistes dont elle est l'égérie.. mais également des amis anglais comme Harold Acton, John Banting, William Bird, un célèbre journaliste américain…
Une maison d'édition et d'illustres auteurs
En 1928, Nancy Cunard fonde même une maison d’édition "Hours Press". Elle installe une énorme presse à bras.
Le premier livre paru au "Puits carré" : un rapport de Norman Douglas sur les carrières de pierre des Iles Lipari, en 80 exemplaires. D'autres ouvrages suivront : une traduction, réalisée en moins de cinq jours par Aragon, d’un des livres de Lewis Carrol, "La chasse au Snark". Puis, un recueil de poèmes toujours d’Aragon et des livres pour les causes qu’elle défend : celles des noirs et un mouvement antifranquiste.
En 1929, elle allait avoir 34 ans, plutôt que d’affronter un nouvel hiver, décida de transporter "Hours Press" à Paris.
Un poème contre toutes les guerres
Pendant la dernière guerre mondiale, la maison est d’abord occupée par les Allemands, puis semble-t-il, pillée par les habitants du village. Devant ce désastre, après un classement sans suite de la plainte qu’elle a déposée, Nancy Cunard, désespérée, vend la maison et se réfugie en Dordogne au printemps 1950.
Depuis longtemps, "pour les yeux d’Elsa", Louis Aragon est parti.
Nancy Cunard poursuit ses collections : amants, livres, bouteilles d’alcool et tranquillisants.
"Je travaille à un poème contre toutes les guerres… A boire du vin rouge..." sont ses dernières paroles le 16 mars 1965, date à laquelle elle meurt attachée sur un lit de la salle commune de l’hôpital Cochin à Paris, à 69 ans.